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Le gisement d'Étiolles « les Coudrays » (Essonne), fouillé depuis 1972, a livré d'abondants vestiges de campements magdaléniens. La superposition de plusieurs niveaux d'habitat (au moins 8) apporte la preuve que la vallée de la Seine, en aval de Corbeil-Essonnes, représentait une étape traditionnelle dans le parcours de groupes de chasseurs nomadisant dans le centre du Bassin parisien.
Un autre gisement proche, « les Tarterets », confirme l'attrait que représentait cette portion de vallée pour ces Magdaléniens. Les datations absolues au Carbone 14 situent la fréquentation du site d’Étiolles à fin du Paléolithique supérieur, essentiellement durant un épisode climatique tempéré – le Bölling – il y a plus de 14 000 ans.
L'intérêt de ce gisement réside principalement dans la bonne conservation de structures d'habitat nombreuses et variées (foyers, concentrations de silex, aménagements pierreux des habitations...) et dans l'extrême abondance des restes de taille qui témoignent de l'importance de cette activité dans les campements successifs. Par exemple, l’une des habitations les plus riches du site (U5) a livré 21 600 silex taillés qui représentent 300 kg de matière, dont une cinquantaine de nucléus à lames.
Durant l’année 2000, la découverte d’une pierre gravée a encore accru l’importance du site pour la connaissance du Magdalénien régional.
La présence d'un silex de très bonne qualité, accessible à proximité du site, a certainement représenté un élément attractif dans le choix d'implantation des campements. Le nombre et les dimensions des blocs débités ont permis une production exceptionnelle de grandes lames qui révèle une très grande maîtrise des tailleurs. La haute valeur qu’ils attribuaient à cette matière première transparaît dans le fait que les déchets de la taille n’étaient pas évacués de manière anarchique mais soigneusement regroupés en amas bien circonscrits.
Néanmoins le site d'Étiolles n'était pas un lieu spécialisé dans la taille du silex même si la place prise par cette activité est indéniable. Étiolles était un véritable campement, réunissant des groupes familiaux qui ont vécu là temporairement (peut-être une saison ?) et ont occupé une partie de leur temps à des activités habituelles sur un lieu d'habitat de chasseurs nomades. La découverte de restes fauniques (surtout du renne), d'armatures d'armes de chasse, d'outils ayant servi à des activités diverses (boucherie, travail de la peau et de l'os) sont autant de témoignages de la vie de ces familles magdaléniennes qui ont séjourné en bordure de Seine.
L’analyse comparative des unités d’habitation fait apparaître les traditions spécifiques des Magdaléniens d’Étiolles dans la manière d’organiser leur lieu de résidence et leurs activités. La disposition des campements s’adapte aux caractéristiques locales du paysage, comme la présence d'un petit affluent de la Seine, le ru des Hauldres, qui a déterminé l'emplacement des habitations et des aires d’activité. Les tentes étaient installées au sommet de l’ancienne berge du ruisseau tandis que sur le versant, plus près de l’eau, s’alignaient des foyers annexes, probablement allumés à ciel ouvert.
L’espace intérieur des tentes est lui aussi ordonné. Le foyer est aménagé en position centrale ; autour de lui, on distingue un secteur d’activités intenses où l’on se réunissait pour fabriquer l’équipement lithique et se nourrir : c’est le lieu communautaire par excellence qui s’oppose à un secteur plus réservé, peu encombré de vestiges, probablement consacré au repos. À proximité des abris, à l’extérieur, les occupants des tentes rejetaient les déchets de silex mais aussi débitaient du silex ou pratiquaient encore d’autres travaux requerrant un besoin de place (travail du bois, de la peau…).
Sur cette organisation des activités, dans et autour de la tente, se greffe une hiérarchisation de l’espace liée à la compétence des tailleurs : c’est ce que révèle la répartition spatiale des débitages. Dans l'abri, les occupants ne s'installaient pas de manière indifférente. Par exemple, les tailleurs les plus qualifiés débitaient le silex à proximité du foyer tandis que les jeunes apprentis devaient s'exercer plus en retrait, près de la zone de repos. Ainsi, l’occupation de l’espace habité était soumise à des règles de vie collectives, révélant, pour certaines, le statut des occupants de la tente.
Cependant, à côté de ces comportements qui se retrouvent de niveau en niveau et semblent bien ancrés dans des traditions culturelles, on observe aussi une grande diversité des aménagements de l’habitat, signe d’une certaine liberté des choix dans ce domaine.
Celle-ci apparaît notamment dans l'agencement des foyers : des grands foyers entièrement couverts de pierres (l’un regroupait plus de 700 pierres, entières ou le plus souvent fragmentées, sur 4 m2), d'autres en cuvette avec une bordure de pierres, d'autres encore plats et non construits.... On le voit, leur degré de complexité est très variable, en partie lié à leur fonction dans le campement : foyers d'habitation ou foyers de plein air.
Une même diversité caractérise l'aménagement des habitations. Parfois des éléments de construction sont visibles, cercles de dalles, alignements internes de pierres ; parfois, au contraire, il ne reste aucune trace des limites et des parois intérieures de la tente. Le sens à donner à cette variabilité de l’habitat est un des objectifs de la recherche conduite sur ce site.
Parmi les hypothèses possibles, on peut avancer une évolution de la société magdalénienne. En effet, le site d’Étiolles a connu une durée d’occupation qui a pu être suffisamment longue pour que se manifestent des changements dans plusieurs domaines de la culture matérielle comme la taille du silex et l’organisation de l’habitat.